Des patients
Il y a certainement dans le monde de nombreuses maladies qui sont mal traitées par les médecins, mais celles qui sont mal traitées par les patients eux-mêmes sont encore plus nombreuses. Les erreurs commises par les mauvais médecins peuvent être corrigées si on consulte un bon médecin. Les erreurs commises par les patients sont le résultat de tellement de mauvais comportements qu’on ne peut pas en faire la liste.
Par exemple, le fait d’inviter un médecin sans s’inquiéter se savoir s’il est de bonne ou de mauvaise qualité est l’une des erreurs commises par les patients.
Prendre ses oreilles pour ses yeux, ce qui signifie prendre pour vrai ce que l’on dit d’un médecin sans le vérifier soi-même, ceci est une autre erreur.
Ou alors il se peut que l’on ait de bonnes relations avec quelqu’un depuis un certain temps et que l’on en profite parce que ceci est plus pratique. Aussi, on pense que si l’on fait appel à quelqu’un d’autre, le premier l’interprétera comme un manque de respect. Surtout que cette relation acceptera volontiers cette charge en espérant une récompense. Les anciens appelaient ce comportement comme : donner sa vie comme une faveur. C’est là une troisième erreur commise par les patients.
Ou alors un personnage pervers vient de loin et prétend être un médecin célèbre. Il roule les gens ignorants avec des propos de haut vol, et ces derniers ne contrôlent rien et croient à ses mensonges. C’est une quatrième erreur.
Il se peut aussi qu’un parent, un ami intime ou quelqu’un de bien placé nous recommande auprès d’un médecin convenable, et il est difficile de décliner cette faveur. Si toutefois, sous la pression, on invite cette personne, on commet une cinquième erreur.
Ou alors des parents ou des amis ont par hasard étudié quelques textes médicaux et se croient eux-mêmes experts en littérature médicale. Chaque fois qu’il voient une prescription, ils se permettent quelques remarques infondées et changent de leur propre chef les herbes. Si le résultat de ce changement est favorable, ils s’en attribuent le mérite ; s’ils font une erreur, ils en adressent le reproche aux autres.
Ou encore, plusieurs médecins ont été recommandés et se diffament les uns les autres. Des factions apparaissent, et si les choses vont de mal en pis, chacun crée son parti. Ceux que les patients ne suivent pas, contrairement à ce que l’on est en droit d’attendre, se réjouissent du malheur des autres, espérant ainsi gagner. Ils se moquent que les patients survivent ou meurent. C’est une septième erreur.
Ou la condition de la maladie est juste en train de tourner favorablement, mais le traitement n’est pas encore un plein succès. Le patient commence à douter de la thérapie juste à cet instant, croyant que le progrès est trop lent. Soudain, le médecin fait l’objet de toutes sortes de calomnies, et une autre direction est prise au milieu du chemin. Aussi, on change de médecin, et quand on en arrive à une situation critique, le résultat est, contrairement à la réalité, reproché au premier. C’est une huitième erreur.
Aussi, la maladie peut prendre un tour inhabituel. En fait, il serait approprié que le patient prenne Guizhi (Ramulus Cinnamomi) ou Fuzi (Radix Aconiti Carmichaeli Praeparata) le matin et Huangqin (Radix Scutellariae) ou Huanglian (Rhizoma Coptidis) le soir. Ou sa condition est sûrement dominée par le vide, mais sa condition pathologique nécessite, contrairement aux attentes, la prise de Mangxiao et Dahuang . Ou c’est quelqu’un dont le corps est fort et marqué par la plénitude mais qui souffre d’une condition pathologique qui nécessite, contrairement aux attentes, une prise de Renshen (Radix Ginseng) ou de Baizhu (Rhizoma Atractylodis Albae). Le patient ne comprend pas les raisons de son traitement et le considère comme étrange. Il ne suit pas les conseils qui lui sont prodigués, mais écoute un charlatan. C’est la neuvième erreur.
Ou il se peut que le patient soit misérable et ne profite que de ce qui est bon marché. Actuellement les médecins n’en font qu’à leur tête, ils ne m’écoutent pas. Ils sont très différents de ces gens proches qui sont facile à vivre, avec qui on peut discourir et dont on peut calculer à l’avance la rémunération. Bianjiu disait : « Ceux qui ignorent leur corps et qui insistent sur la santé ne doivent pas être traités ». C’est une dixième erreur.
La liste ci-dessus n’est pas exhaustive. On peut aussi citer les gens qui abusent de Renshen (Radix Ginseng) ou de Fuzi (Radix Aconiti Carmichaeli Praeparata) et craignent quand on leur prescrit une formule d’attaque. S’ils meurent de leur abus de Renshen (Radix Ginseng) ou de Fuzi (Radix Aconiti Carmichaeli Praeparata), c’est le destin. S’ils meurent de leur traitement d’attaque, le reproche est adressé au médecin. C’est pourquoi les médecins n’osent plus appliquer un traitement adapté aux conditions pathologiques.
De plus, il arrive que les patients ne préparent pas les herbes selon les instructions du médecin, qu’ils ne les cuisent pas selon les règles ou qu’ils ne les prennent pas quand ils le doivent. Leurs aliments et leurs boissons, leur lever et leur coucher, leur exposition au froid et à la chaleur, leur fatigue et leur repos, leurs joies et leurs colères, ainsi que leur façon de parler ; rien ne se fait à temps et rien n’est régulier. Il serait difficile de faire une liste de ces mauvais comportements. Tant qu’il s’agit de maladies mineures, il n’y aura pas de souffrance. Mais en cas de maladie sérieuse, la moindre infraction à ces règles suffira pour léser la vie du patient. Alors, comment le patient doit-il procéder ?
Il est essentiel de choisir un médecin reconnu et de lui faire confiance. Il en est de même du premier ministre pour un souverain. Le souverain choisit un homme d’État capable et vertueux et lui confie son bureau. Le principe est le même. Mais quelle est la bonne méthode pour choisir un médecin capable et vertueux ? On doit choisir une personne avec un caractère droit. Ses idées et ses compétences doivent être pures et correctes. De plus, on doit vérifier que sa connaissance ait une base solide, et que son expertise soit profonde. On doit vérifier ses soins durant un laps de temps. S’il est capable de soigner huit ou neuf cas sur dix, alors on peut l’inviter à nous traiter.
Toutefois, tous les médecins sont particulièrement doués dans un secteur ou un autre. Et il serait une fois de plus erroné de faire soigner une maladie à quelqu’un qui ne serait pas spécialisé dans ce domaine. On doit veiller attentivement à ce que son jugement mette bien le doigt sur la nature de la maladie ; il doit être modeste et droit. Et sa prescription doit aller droit au but. Alors seulement on peut faire confiance à son traitement. Quand je dis « aller droit au but », je veux dire qu’au moment où il décide de la formule, il doit faire valoir les raisons du choix de cette formule particulière, et prévoir quels seront les effets de la prescription. Ou alors il doit dire que le patient devra prendre plusieurs doses avant que la formule n’ait de l’effet. Et chacune de ces affirmations doit s’avérer vraie. C’est ce que j’appelle « aller droit au but ».
Si l’on a essayé un médecin de ce genre, le problème est résolu dans sa majeure partie. Si ce médecin ne valait pas la peine d’être choisi, et si son discours est étrange plutôt que basé sur les classiques, ou s’il fait montre d’incertitude dans son approche, s’il est confus et si l’effet des herbes n’est pas celui annoncé, alors on doit chercher un autre spécialiste renommé. On ne doit pas risquer sa vie imprudemment. Voilà la méthode pour choisir un médecin.